Impacts des opérations d’extraction d’agrégats sur les valeurs des propriétés
Évaluation immobilière au Canada
Rechercher dans la bibliothèque en ligne
Ce texte représente une section d’un article plus approfondi rédigé sur le sujet par M. Sevelka. L’article complet a été publié dans le Journal of Environmental Law & Policy et on peut le consulter en cliquant sur le lien suivant : www.grassrootsjournals.org/jelp/0203m00310.html#status
La valeur marchande est la mesure standard de la valeur d’une propriété échangée dans un marché ouvert, actif et transparent, alors qu’elle suppose que l’acheteur est bien informé et bien conseillé lors de son achat. Les agents immobiliers, dont la plupart comprend peu ou pas les effets externes occasionnés par l’industrie des agrégats et les vendeurs qui les représentent ont rarement l’habitude de divulguer les effets néfastes d’une exploitation d’agrégats, par crainte de devoir réduire le prix offert de leur propriété. L’argument souvent avancé par l’industrie des agrégats pour refuser de reconnaître les effets adverses d’une exploitation d’agrégats sur les valeurs des propriétés résidentielles avoisinantes repose sur l’hypothèse implicite, mais irréaliste, qu’un acheteur éventuel sait à quels impacts nuisibles il sera exposé. …[L’]industrie des agrégats ne devrait pas s’attendre de façon réaliste à ce qu’un acheteur consulte le bureau du greffier du comté, les dossiers de la commission de planification ou de zonage, le Army Corps of Engineers, la United States Geological Society, le géologue de l’État, d’autres organismes et l’Internet avant d’acheter une maison, encore moins à ce qu’il demande à un inspecteur de bâtiments, un hydrologue, un géologue et un météorologue de se rendre sur les lieux [p. 41].186
Le modèle hédonistique des prix de Guignet (2011)187, conçu pour mesurer l’impact d’une nuisance environnementale sur les prix des maisons, a permis de constater que si les vendeurs et les acheteurs ignoraient la présence d’un réservoir souterrain non étanche (RSNE), il n’y avait pas d’impact mesurable sur le prix de la maison. On indiquait que :
« Sur l’ensemble, dans mon application hédonistique, je constate que les RSNE [réservoirs souterrains non étanches] ont en général peu d’effet sur les valeurs des maisons locales. Je pense que c’est parce que les acheteurs et les vendeurs (du moins dans ces marchés du logement et durant cette période) ne sont pas habituellement au courant de la nuisance. Mais j’observe une dépréciation importante des maisons quand je sais que ces ménages sont bien informés, de même que dans les études de préférence où les répondants sont explicitement informés dans le cadre du concept de l’étude. »
Comme l’information importante influençant la valeur est habituellement asymétrique, provenant seulement du vendeur, les acheteurs éventuels surpayent pour des propriétés affectées par des opérations d’agrégats ou d’autres nuisances/effets externes.188 Une recherche Internet liée à l’incidence potentielle des opérations d’agrégats sur les valeurs des propriétés résidentielles avoisinantes a produit les études de proximité suivantes :
Étude de proximité no 1
Dans une vaste étude révisée par les pairs sur l’impact des mines de roche (carrières) sur les prix des propriétés résidentielles, la première en son genre,189 Malikov, et al. (2018) ont documenté un échantillonnage de 5500 ventes de maisons ayant eu lieu dans le comté de Delaware, en Ohio, de 2009 à 2011 (environ deux ans). Il y a dans le comté quatre mines (carrières) de roches de surface (calcaire), dont trois ne sont plus exploitées. La seule carrière en opération (mine d’État : Del-5), d’une superficie de 510 acres, se trouve aussi être la plus grande et elle est sujette au dynamitage, ce qui occasionne une nuisance beaucoup plus importante (danger) que les autres types de mines de surface. On disait expressément :
« Comme les autres mines du comté n’étaient plus en opération au moment de notre étude et ne faisaient donc plus de bruit, de poussière et de trafic, notre analyse vise seulement la mine opérationnelle Del-5, non seulement très vaste, mais également située dans un secteur de développement urbain très actif. »
Un logiciel standard a servi à calculer les distances en ligne droite entre chaque propriété (vente) et le centroïde de la mine Del-5. L’étude a dégagé d’importants effets néfastes pour les propriétés situées près d’une mine (carrière) de roches opérationnelle, qui diminuent graduellement après de zéro à une distance d’environ 10 milles (16,093 kilomètres). Pour une propriété résidentielle au milieu de l’échelle des prix (t = 0,50), nos estimations donnent à penser qu’entre deux maisons identiques, celle située un mille plus près d’une mine de roches devrait avoir un prix moyen environ 3,1 % moins élevé.190 Les rabais moyens analogues pour les maisons dans les premier et troisième quartiles de l’échelle des prix sont d’environ 2,3 % et 3,4 %, respectivement. Pour une propriété haut de gamme dans le 0,95e quantile [prix moyen de la maison 552 500$], c’est un stupéfiant 5,1 %. C’est plutôt prévisible en raison de la fourchette de revenus, où les ménages à plus hauts revenus sont davantage en mesure de payer pour jouir d’une meilleure qualité environnementale : dans ce cas, la distance les séparant de la nuisance. « Inversement, les ménages à plus faibles revenus et aux maisons moins chères sont peut-être plus disposés à sacrifier la qualité de l’environnement à d’autres caractéristiques de la maison plus nécessaires, comme un accès plus facile à l’emploi, incluant les emplois dans l’industrie minière de roches elle-même produisant des effets externes environnementaux. »191
À titre de calcul approximatif du bien-être utilisant des quantiles d’échantillonnage sans conditions des valeurs des maisons correspondant aux fonctions des quantiles ajustés,192
les estimations de rabais ci-dessus supposent la perte moyenne de valeur de propriété associée à la maison située un mille [1,609 kilomètre] plus près d’une mine de roches, allant de
3691 $ à 10 970 $ pour les maisons dans l’écart interquartile de l’échelle des prix. Pour les voisinages plus dispendieux dans le 0,95e quantile, ces pertes peuvent atteindre, en moyenne, 28 410 $. Un annexe supplémentaire193 de l’étude, publié le 9 juillet 2018, comprend l’énoncé suivant :
« Nos estimations donnent à penser que, toutes autres choses étant égales, une maison située un mille [1,609 kilomètre] plus près d’une mine de roches a son prix fixé, en moyenne, à environ 2,3 à 5,1 % de rabais, alors que les propriétés plus dispendieuses sont sujettes à de plus importantes réductions de prix. »
Étude de proximité no 2
La professeure Hite a entrepris en 2015 une étude qui analysait les impacts des mines de roche et de gravier sur les valeurs des maisons dans le nord-ouest de l’État de New York. L’étude utilisait un grand ensemble de données sur les ventes de maisons négociées par un agent immobilier par l’entremise d’un service interagences (18 941) dans la période du 1er janvier 2000 au 7 mai 2015, avec toutes les ventes ajustées en dollars de 2015, basé sur l’IPC pour les maisons dans les secteurs entourant trois carrières de pierre et une carrière de sable/gravier dans les comtés de Columbia, Saratoga et Rensselaer. Les ventes entourant les quatre mines viennent des données de Capital Region Multiple Listing Service et, selon Mme Hite, utilisent seulement des ventes où l’agent immobilier a servi de médiateur dans les modèles hédonistiques des prix, qui démontrent invariablement des nuisances ayant de moins grands impacts que celles incluant toutes les ventes de maisons (Jauregui et Hite, 2009);194 « …ainsi, les estimations d’impacts dans la présente étude devraient être considérées comme des sous-estimations des véritables impacts produits par les mines [d’environ 3,0 %].
L’étude de Mme Hite que la Ville de Nassau, dans l’État de New York, a utilisé en 2015 dans son examen de la demande de permis de carrière avec dynamitage de la compagnie Troy Sand & Gravel Co., Inc., avec une durée prévue de 150 ans sur une parcelle de 89 acres (36,017 hectares) dans une parcelle de 216 acres (87,412 hectares), concluait que :
- Les opérations minières sont une nuisance qui aurait un impact négatif sur les valeurs des propriétés, allant d’un rabais de 7,5 à 36 %. Relativement à ces rabais, elle concluait (page 12)195 que ‹ Ces rabais sont statistiquement importants au niveau 99+%; une telle importance nous porte à conclure que, sans aucun doute, la carrière que Troy Sand & Gravel Co., Inc. propose de développer et d’exploiter dans la Ville de Nassau, comté de Rensselaer, État de New York, aura une incidence financière néfaste sur les propriétaires existants [emphase dans l’original]. ›
- …[I]l y a 293 parcelles résidentielles dans un mille [1,609 mètre] du site [proposé] pour la mine, ce qui équivaut à environ 750 personnes (293 résidences à
2,6 personnes par ménage, selon le US Census Data). Cela représente environ 15 % de la population de la Ville [de Nassau]. La Ville ne considère pas le site comme un emplacement éloigné [p. 35].
- La plupart des gens ont l’intuition qu’une exploitation telle une mine – qui engendre du trafic, du bruit, de la poussière et qui est très peu attrayante – entraînerait une baisse des prix des maisons avoisinantes. Des études statistiques ont supporté cette intuition, alors que l’étude courante démontre ces impacts scientifiquement, de façon conservatrice… L’article de 1998 du docteur Hite, paru dans la revue Land Economics,196 constatait que les individus qui connaissaient l’existence d’une nuisance (dans le cas présent, des sites d’enfouissement), offraient pour les maisons des prix inférieurs à l’intérieur de 3 milles [4,83 kilomètres] avec une baisse moyenne de 10,65 %, comparativement aux individus qui ignoraient la nuisance. Le même groupe de personnes a reçu d’autres rabais, allant jusqu’à 20 %, selon la plus ou moins grande proximité de la nuisance avec les maisons convoitées. De plus, étant donné que les prix des maisons sont influencés par les ventes comparables, même les gens ignorant la nuisance recevaient un rabais sur les prix des maisons [p. 12].197
Comme les acheteurs non informés surpayent pour leurs propriétés affectées par l’exploitation d’une carrière, une nuisance reconnue, ces transactions contaminent le groupe de données des ventes comparables si les agents immobiliers s’en servent pour fixer les prix offerts ou si les évaluateurs immobiliers estiment la valeur marchande.
Étude de proximité no 3
L’étude Erickcek de 2006198 sur l’impact économique de la Stoneco Gravel Mine (Pit), d’une superficie de 853 acres, lorsque fonctionnant à pleine capacité, concluait que les valeurs des propriétés résidentielles à Richland et dans le canton de Richland, au Michigan, seraient réduites de 31,5 millions $, affectant la valeur de 1400 maisons, ce qui représente plus de 60 % des résidences de Richland, avec des propriétés résidentielles diminuant de 20 % dans un demi-mille (805 mètres) à 4,9 % dans 3 milles (4828 mètres) :
« Une propriété résidentielle située à un demi-mille (805 mètres) d’une mine (carrière) de gravier connaîtrait une réduction estimée à 20 % de la valeur; à un mille [1609 mètres] de la mine, une réduction de 14,5 %; à 2 milles [3219 mètres] de la mine, une réduction de 8,9 %; et à 3 milles [4828 mètres] de la mine, une réduction de 4,9 %. Ces estimations sont similaires à celles publiées dans les revues spécialisées sur les effets des sites d’enfouissement sur les valeurs des propriétés avoisinantes [p. 5]. »
« La perte de valeur des propriétés résulte des conséquences négatives de l’exploitation d’extraction et reflète la détérioration de la qualité de vie dans le secteur, uniquement due aux opérations de la mine de gravier. En d’autres mots, la perte de valeur des maisons est une façon de quantifier en dollars la détérioration de la qualité de vie, telle qu’immobilisée dans le prix des maisons. Elle capture le prix réduit que le propriétaire devrait offrir pour inciter un nouvel acheteur [informé] à acquérir la propriété. Même si les propriétaires ne déménagent pas à cause de la mine de gravier, ils perdront leur avoir propre foncier parce que le prix de vente potentiel de leur maison est inférieur. Ainsi donc, peu importe si oui ou non une personne vend effectivement leur maison, elle mesure les effets néfastes sur leur qualité de vie parce qu’ils subissent les nuisances produites dans le secteur par la mine de gravier [p. 6]. «
Le ‹ modèle hédonistique des prix › utilisé par Erickcek a été élaboré par la professeure Hite, de l’Université d’Auburn, basé sur les données détaillées des transactions provenant du comté de Delaware, en Ohio, dans le but initial d’étudier les questions de planification de l’utilisation des terres (Erickcek, 2006) :
« Mme Hite examine les effets de la distance d’une mine de gravier de 250 acres [c.àd. une carrière de calcaire avec dynamitage] sur le prix de vente de 2552 propriétés résidentielles, de 1996 à 1998. Son modèle contrôle une grande série d’autres facteurs qui déterminent le prix de vente d’une maison, incluant le nombre de pièces, le nombre de salles de bain, la superficie en pieds carrés, les dimensions du lot, l’âge de la maison, la date de vente et d’autres facteurs propres à la localité, afin qu’elle puisse se concentrer uniquement sur l’effet de la proximité de la mine de gravier [c.-à-d. une carrière avec dynamitage] sur les valeurs des maisons. Elle observe un effet statistiquement significatif de la distance d’une mine de gravier [c.-à-d. une carrière avec dynamitage] sur le prix de vente des maisons : concernant le contrôle d’autres déterminants de la valeur résidentielle, la proximité avec une mine de gravier réduit le prix de vente. Spécifiquement, Mme Hite rapporte que l’élasticité des prix des maisons relativement à la distance d’une mine de gravier [c.-à-d. une carrière avec dynamitage] est de ,097, signifiant qu’une augmentation de 10 % de la distance d’une mine de gravier est associée à un peu moins qu’une augmentation de 1 % de la valeur des maisons, toutes autres choses étant égales.199 À l’inverse, plus la maison est proche de la mine, plus elle perd de la valeur. »
Selon la professeure Hite, les résultats du modèle présentés sous la forme élastique sont assez difficiles à comprendre pour les profanes. Erickcek a donc transformé le modèle d’élasticité en un graphique qui calcule les rabais immobiliers associés au modèle estimé démontrant que la réduction de la valeur des maisons figurant dans le graphique (page 5) due à la mine (carrière) allait de 30 %, adjacent à la mine (carrière) à environ 5 %, à 3 milles (4828 mètres) de la mine (carrière). Alors que l’étude Hite utilisée par Erickcek a trait à une carrière avec dynamitage, Erickcek justifiait et expliquait sa confiance dans l’étude Hite pour mesurer l’impact d’une carrière de gravier proposée, comme si elle fonctionnait à pleine capacité, sur les valeurs des propriétés du secteur dans son addenda du 20 décembre 2006. Les points suivants sont notables dans ce contexte :
- Les modèles hédonistiques des prix sont la technique de recherche standard pour estimer les impacts sur les valeurs des propriétés depuis des décennies.
- Le rapport Upjohn fondait ses estimations des impacts sur les valeurs des propriétés à Richland sur les estimations du modèle de recherche de la professeure Hite, parce que sa recherche employait des données de qualité supérieure. En outre, son étude était la seule que nous connaissions à l’époque qui utilisait les modèles hédonistiques des prix pour estimer les impacts des mines sur les valeurs des propriétés résidentielles. Depuis que nous avons mené l’étude, nous avons pris connaissance d’une autre étude utilisant les modèles hédonistiques des prix et nous avons effectué notre propre analyse en employant des données sur une mine de gravier dans le secteur, provenant d’un rapport consultatif de l’industrie [Sustaining A River: An Economic Impact Study of the Lower Great Miami River Segment Improvements, par Radha Ayalasomayajula, Fred Hitzhusen et Pierre Wilmer Jeanty].
Cette étude employait un modèle hédonistique des prix semblable à celui utilisé dans l’étude de la professeure Hite pour évaluer l’impact des exploitations minières de gravier près de la Great Miami River dans les comtés de Butler et Hamilton, en Ohio. L’échantillonnage contenait les données de vente pour seulement 119 maisons, soit beaucoup moins que les 2552 maisons qu’avait la professeure Hite dans son échantillonnage. Le modèle servant dans cette étude tenait compte des caractéristiques structurelles de chaque maison, y compris le nombre de salles de bain, la partie habitable, l’âge, le nombre de chambres à coucher et s’il y avait ou non un foyer. De plus, il incluait la distance à une mine de gravier et la distance jusqu’à la zone urbaine la plus proche. L’étude révélait qu’en moyenne, les valeurs des propriétés avaient augmenté de 1675 $ par chaque 1/10e de mille [161 mètres] qui séparait la maison de l’exploitation minière. En d’autres mots, une maison située à un mille [1609 mètres] d’une mine de gravier vaudrait 16 725 $ de plus qu’une maison identique située à proximité de la mine. L’analyse de l’étude portait seulement sur un rayon d’un mille.200
Bien que le jeu de données de la professeure Hite soit idéal pour étudier ces impacts sur les valeurs des propriétés, nous hésitions à fonder le rapport Upjohn sur son analyse initiale. La professeure Hite a accepté de faire d’autres travaux pour l’Institut [sans demander de rémunération]… [C]ela impliquait de faire des vérifications sur les données et sur des constructions variables, ajouter des variables de contrôle et tester la robustesse de ses résultats contre les spécifications du modèle. Les simulations présentées dans le rapport Upjohn reposaient entièrement sur les nouveaux travaux effectués par Mme Hite pour l’Institut Upjohn et montraient des impacts moins grands sur les valeurs des propriétés que dans son rapport initial… L’intérêt de la professeure Hite dans ce projet était seulement de produire une recherche de haute qualité, publiable dans un journal scientifique révisé par les pairs.201
Comme l’a fait remarquer la professeure Hite, les carrières ont plusieurs similitudes en termes d’opérations :
« J’aimerais souligner que les deux types d’exploitation de gravier [gravières et carrières] sont très similaires en ceci que, comme les sites d’enfouissement, ils causent plus de trafic, de bruit et de poussière, de même que la destruction de grandes bandes de terres… [L]a principale différence est que le gravier produit dans une carrière de calcaire requiert beaucoup plus de dynamitage. Dans la mesure où le dynamitage produit des niveaux plus élevés de bruit ou de poussière pour les résidents du secteur, ces opérations peuvent avoir des effets encore plus néfastes sur les valeurs des propriétés avoisinantes. Les effets néfastes des carrières de calcaire sur les propriétés dans mon étude sont très importants… et… il est improbable que tous ces effets néfastes sur les propriétés soient dus au dynamitage. »
Erickcek a également tenu compte du témoignage d’un assesseur lors d’une audience publique tenue le 9 août 2006 dans le Village de Howard, comté de Cass, concernant la demande d’un permis d’usage conditionnel de Moose Lake Aggregate, confirmant que les évaluations de 13 résidences situées près de la Moose Lake Gravel Mine ont été réduites de 30 %, selon son expertise. La réduction estimée de 30 % dans les évaluations de ces 13 propriétés est presque identique aux estimations dans l’étude de l’Institut Upjohn. Plus tard, l’assesseur du Village a révisé l’impact négatif à seulement 10 %; toutefois, après que deux propriétaires de maisons affectées aient protesté, l’assesseur a rétabli l’impact négatif de l’exploitation minière à 30 % de la valeur estimée original du propriété. Les deux propriétaires ont commandé une évaluation indépendante de leurs maisons et l’évaluateur du Village était d’accord :
« Je crois que si j’avais eu les évaluations avant… j’aurais probablement laissé les valeurs de tout le monde à 70 %, mais je n’avais aucune information à ce sujet. » [Note en bas de page omise]
En plus des répercussions néfastes (nuisances) évidentes de la poussière et du bruit engendrées par les opérations d’une gravière active, qui diminuent avec la distance de celle-ci, trois autres répercussions néfastes ou négatives qui ne diminueraient pas aussi rapidement avec la distance sont la congestion du trafic et les accidents de la circulation, la réputation des villes ou des communautés et l’incertitude sur le développement et les plans futurs d’utilisation des terres, tous ces facteurs causant un impact négatif sur les valeurs des propriétés résidentielles. Ils sont
décrits ci-dessous :
- Congestion routière : Même si les résidents du Village ne vivent pas sur des routes de camions potentielles ou qui résident assez loin de la mine pour éviter sa poussière et son bruit, ils verront une plus grande congestion routière [et des accidents de la circulation] due au trafic des camions engendré par la mine. Les camions de gravier peuvent se déplacer lentement et être difficiles à dépasser. Aussi, en l’absence de trottoirs, les camions devront partager la route avec les piétons et les cyclistes. De plus, alors que la route de camions proposée pour la mine de gravier reste à l’écart du Village de Richland, les entrepreneurs de camionnage indépendants seraient autorisés par la loi de l’État à traverser le Village sur la M-43 et/ou la M-89. Dans certains cas, cela pourrait être la route la plus économique pour les camionneurs indépendants. Le cas échéant, cela aura un impact négatif sur l’environnement du Village que devraient subir presque tous les résidents.
- Réputation du secteur : Tout comme des commodités comme un bon système scolaire peuvent améliorer la réputation d’un village et augmenter la valeur de ses propriétés, l’introduction d’une nuisance comme une mine de gravier peut ternir la réputation du secteur [communauté] et du même coup faire chuter les valeurs des propriétés. Comme l’écrit George Tolley, de l’Université de Chicago, « les gens vivant à l’écart du secteur, qui ne sont pas directement affectés par les nuisances, considèrent le secteur comme indésirable. »202
- L’exploitation pourrait également altérer les plans de développement futur du village. En immobilier, l’incertitude fait seulement diminuer les valeurs des terres. Une fois l’exploitation minière en place, cela peut favoriser l’acceptation d’autres utilisations de l’industrie lourde dans le village. Bref, la mine de gravier pourrait ouvrir la porte à d’autres industries lourdes primaires. C’est le principe de la « dégradation contagieuse ». En fait, un argument cité pour défendre l’usage de la 24e Rue par les camions est qu’elle était utilisée avant par les camions lourds qui se rendaient à un site d’enfouissement, maintenant fermé. En résumé, cela augmentera l’incertitude sur l’acceptation d’autres industries lourdes bruyantes dans la région.
Étude de proximité no 4
En 2020, Kolala et al.203 entreprenaient une étude employant la méthode hédonistique des prix (Rosen, 1974)204 pour quantifier l’impact de la super-carrière Fimiston, située dans l’ouest de l’Australie, sur les valeurs des propriétés résidentielles à proximité de celle-ci, qui fait 3,5 km de longueur, 1,5 km de largeur et 300 m de profondeur. La population de Kalgoorlie-Boulder est estimée à 32 000 personnes, alors que la principale activité économique est l’extraction minière, suivie de l’agriculture, de la fabrication et de la transformation. Les plaintes les plus fréquentes des résidents qui se trouvent à proximité de la super-carrière ont trait au dynamitage, au bruit et à la poussière. Pour évaluer l’impact des nuisances › de la mine d’or à ciel ouvert sur les valeurs des propriétés résidentielles de la communauté, on a analysé les données de vente de 21 850 propriétés résidentielles vendues à Kalgoorlie-Boulder, entre 1990 et 2018, en ajustant les valeurs en dollars de 2012 avec l’indice des prix à la consommation (IPC). Le prix de vente moyen d’une maison dans l’échantillonnage de 21 850 maisons vendues est de 250 000 $AU (en prix de 2012); en moyenne, elle a un lot de 700 mètres carrés (7535 pi. ca.), trois chambres à coucher et une salle de bain; et elle est située à 3 km (1,864 mille) de la super-carrière, à 2,5 km (1,553 mille) du quartier central des affaires, à un km de l’école la plus proche et à 0,5 km (0,311 mille) du parc le plus proche.
La distance entre la super-carrière et la première rue avec des propriétés résidentielles est de moins de 200 mètres (656 pieds) et la distance maximale avec les résidences est juste en deçà de 7 km (4,35 milles). Le jeu de données contient des renseignements sur le prix de vente, l’emplacement et la date de la vente, ainsi que des détails sur les maisons comme le nombre de chambres à coucher et de salles de bain, les dimensions du lot, le type de couverture, le matériau de construction des murs ainsi que l’année de construction de la maison. Les données initiales contenaient plus de 30 000 dossiers de vente, mais après avoir vérifié les données et limité les observations aux habitations et unités individuelles dans la région métropolitaine de Kalgoorlie-Boulder, …[il restait] 21 850 dossiers complets. La distance maximale séparant une résidence de la super-carrière est juste en deçà de 7 km… Les données cadastrales ont été obtenues de Landgate, l’autorité d’information sur le territoire dans l’ouest de l’Australie… [L]a distance ente chaque maison et les commodités pertinentes du voisinage (écoles, parcs, installations sportives et quartier central des affaires) et les nuisances (super-carrière et aéroport) a été déterminée avec ArcMap 10.5. L’estimation du modèle a été… effectuée [dans] R (R Core Team 2019).205
L’étude a révélé que les propriétés résidentielles situées dans les 2 km (1,243 mille) de la super-carrière Fimiston se vendent 20 à 30 % moins cher que les propriétés résidentielles similaires situées à au moins 6 à 7 km (4,35 milles) de la super-carrière. On a aussi conclu que les résultats de l’étude fournissent des informations précieuses pour les planificateurs qui veulent établir des zones tampons appropriées (distance de séparation) autour des opérations minières pour éviter des conflits d’utilisation des terres, tout en protégeant les valeurs des propriétés résidentielles.
Étude de proximité no 5
Dans M & N Materials, Inc. v. Town of Gurley, Alabama, et al., (2015)206, la Cour de district des États-Unis rendait un jugement sommaire en faveur du Village de Gurley, confirmant sa décision du 13 avril 2004 d’annexer les 266 acres (107,65 hectares) de l’exploitant d’une carrière et d’empêcher son exploitation pour des raisons d’effets néfastes potentiels sur l’environnement et sur la communauté relativement à la santé, la sécurité, la moralité et le bien-être général des résidents de la Ville. Concernant les impacts sur les valeurs des propriétés, M. Key, un membre du Appraisal Institute, a préparé une étude de proximité contenant de petits échantillonnages de ventes groupées. Son étude consistait à regrouper des ventes de maisons unifamiliales détachées modestes dans les 875 pieds (267 mètres) des limites du lot d’une carrière qui était en opération lorsque les ventes ont eu lieu, comparativement à un groupe de ventes situées à l’extérieur des 875 pieds des limites du lot de la carrière en opération (c.-à-d. le groupe témoin). Les deux groupes de ventes sont de la même sous-division. Le prix d’achat de chaque vente dans les deux groupes de ventes a été actualisé à la date réelle d’évaluation (23 novembre 2004), et utilisé pour dégager l’impact, le cas échéant, qu’aurait la carrière proposée dans le Village de Gurley sur la valeur des résidences situées à proximité dans les 875 pieds (267 mètres) des limites de la carrière proposée de 266 acres. Combinés, les prix des maisons vendues dans les deux groupes allaient de 82 000 à 125 000 $.
En employant le paramètre de la distance dans l’étude de proximité, M. Key concluait que les résidences situées à l’intérieur de 875 pieds des limites de la carrière proposée essuieraient une diminution (perte) de valeur de 12,2 %, un taux qui tombe dans les rabais de 10 à 15 % suggérés par des agents immobiliers locaux avertis. Les facteurs de risque associés à l’exploitation d’une carrière auxquels les propriétaires sont exposés, tels que dégagés dans l’étude de M. Key, incluent les suivants :
- Jouissance paisible : problèmes de bruit
- Intrusion : Poussière et particules en suspension dans l’air
- Dommages structurels : Dynamitage
- Surveillance constante : Déterminer le changement des dommages structurels
- Résistance du marché : Enjeux de proximité entraînant une diminution de la valeur
L’étude de proximité n’indique pas la distance à des activités réelles de la carrière (extraction minière et dynamitage), un point qui est plus distant que les 875 pieds (267 mètres) mesurés à partir des limites de la carrière. Dans la même veine, la distance entre les activités planifiées de la carrière (extraction minière et dynamitage) et les limites de la carrière proposée ne sont pas spécifiées. Qui plus est, l’étude de proximité ne divulgue pas si les acheteurs des deux groupes de ventes connaissaient les dangers potentiels de la projection de roches, tels qu’identifiés par M. Ludwiczak, l’expert en dynamitage dont le témoignage dans ce cas a également été accepté par la cour.
Les acheteurs quittant les grands centres urbains pour s’installer dans une communauté rurale comme le Village de Gurley (874 habitants en 2004) ne comprendront vraisemblablement pas entièrement les effets délétères associés à la vie près d’une exploitation de carrière où l’on
fait du dynamitage, y compris les dangers que présente la projection de roches, soit le pire effet nuisible en raison de son potentiel de blessure ou de mort pour la vie humaine et non humaine. Si les acheteurs des deux groupes de ventes ne connaissaient pas bien ou s’ils étaient mal conseillés sur les effets néfastes d’habiter près d’une carrière avec dynamitage, on pourrait s’attendre à ce que la perte de valeur des propriétés soit plus élevée. Les acheteurs à qui on donnerait le choix entre deux maisons au même prix et semblables pour l’âge, la qualité de la construction, les matériaux de construction, les services publics et les dimensions du lot éviteraient de choisir la maison à proximité d’une carrière avec dynamitage (ou sans dynamitage).
Conclusion
Alors que les agrégats sont des ressources essentielles pour la construction de routes et de bâtiments, le processus d’extraction des agrégats implique la destruction inévitable des terres où ils se trouvent. Il y a toujours des répercussions nuisibles sur l’environnement occasionnées par les processus et les aspects opérationnels touchant l’extraction des agrégats, impacts qui augmentent en même temps que l’importance, l’intensité, la durée et la multiplication des opérations d’extraction des agrégats. La forme la plus destructive et dangereuse de l’extraction des agrégats vient des carrières qui dynamitent des roches sous la nappe phréatique et qui n’ont pas de chance réaliste d’être réhabilitées. Le dynamitage génère des fumées toxiques, des coups de mine, des vibrations du sol et des projections de roches, des sous-produits inévitables. Il est documenté que le dynamitage répété cause des dommages structurels à une distance considérable du lieu de l’explosion, même si le dynamitage est effectué selon les limites de la réglementation et malgré les affirmations fréquentes du contraire faites par l’industrie des agrégats.
Lorsqu’une exploitation de carrière avec dynamitage est autorisée à s’établir dans le mauvais emplacement géographique et les répercussions nuisibles sur l’environnement et la communauté environnante ne peuvent être réduites à un niveau ‹ insignifiant ›, les effets négatifs externes, financiers et autres, associés à cette exploitation sont subis par le public et par des tierces parties innocentes. Non seulement la santé, la sécurité et le bien-être de la communauté sont-ils compromis, mais plusieurs études de proximité exhaustives ont également conclu que les propriétés résidentielles dans un certain rayon des exploitations de carrière avec dynamitage et des gravières sont moins commercialisables et subissent une perte importante des valeurs des propriétés ou de l’avoir propre foncier des propriétaires. Les maisons haut de gamme subissent des pertes plus importantes que les maisons aux prix plus modestes à distance égale d’une exploitation d’agrégats.
Les planificateurs de l’utilisation des terres agissant pour le compte d’une municipalité, d’un comté ou d’une région, impliqués dans le traitement des demandes de permis d’extraction d’agrégats, ont des obligations découlant de lois et de la common law de protéger la santé, la sécurité et le bien-être des communautés sous leur juridiction, incluant les droits des résidents à l’utilisation et la jouissance ininterrompues de leurs propriétés et à la préservation de la valeur de leurs propriétés (p. ex. l’avoir propre foncier des propriétaires). Un retrait permanent obligatoire sur le site d’au moins 500 m pour protéger les employés de la carrière, combiné à une distance de séparation dans un rayon d’au moins 1000 m à l’extérieur du site, entre la limite d’une carrière et les utilisations des terres ou les activités sensibles, existantes ou proposées, réduirait mais n’éliminerait pas nécessairement tous les effets néfastes. D’autres considérations touchant l’environnement pourraient nécessiter des retraits et des distances de séparation plus importants. Toutes autres choses étant égales, plus une exploitation de carrière est géographiquement éloignée des utilisations sensibles ou incompatibles des terres, plus les impacts délétères sont réduits, y compris les pertes de valeur des propriétés.
Notes en fin de texte
186 Demos Binder, « The Duty to disclose Geologic Hazards in Real Estate Transactions » (1998) 1 (13) Chapman Law Review 13-56. (https://www.chapman.edu/law/files/publications/CLR-1-denis-binder.pdf).
187 Dennis B. Guignet, « What Do Property Values Really Tell Us? Evidence from Revealed and Stated Preference Studies » Dissertation de doctorat, Université du Maryland, College Park, 2011.
188 Neelawala, S.N.S.L.H.P., « Asymmetric Information between Buyers and Sellers in the Residential Property Market, A Hedonic Property Valuation Approach » Dissertation de doctorat, Queensland University of Technology, 2014. (https://eprints.qut.edu.au/76412/5/S.N.S.L.H.P%20Neelawala%20Thesis.pdf).
189 Emil Malikov, Yiguo Sun et Diane Hite, « (Under)Mining Local Residential Property Values: A Semiparametric Spatial Quantile Autoregression » (22 juin 2018) Journal of Applied Econometrics 82-109. (https://onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1002/jae.2655).
190 5280 pieds [un mille] x estimation moyenne de 0,58 % par 1000 pieds. Les estimations de rabais moyens pour les autres quantiles des prix des maisons sont obtenues de la même façon.
191 Cohen et Coughlin (2008) discutent des effets positifs d’accessibilité à l’emploi relativement aux nuisances environnementales qui peuvent contrebalancer les effets externes négatifs dans le contexte d’un aéroport bruyant.
192 Et supposant une disposition marginale constante à payer [note 18 en bas de page].
193 (http://qed.econ.queensu.ca/jae/2019-v34.1/malikov-sun-hite/Malikov-Sun-Hite-Mining-Property-Values-Appendix.pdf).
194 Jauregui, A. et Diane Hite, « The Impact of Realtors on House Prices near Environmental Disamenities «(2009) 20 (2) Housing Policy Debate 295-316.
195 Diane Hite et Derrick Robinson, « The Impact of Hard Rock and Gravel Mines on House Prices in Upstate New York » 23 juin2015.
196 Hite, Diane, « Information and Bargaining in Markets for Environmental Quality » (1998) 74 (3) Land Economics 303-316.
197 Diane Hite et Derrick Robinson, « The Impact of Hard Rock and Gravel Mines on House Prices in Upstate New York «23 juin 2015.
198 Erickcek, G., « An Assessment of the Economic Impact of the Proposed Stoneco Gravel Mine Operation on Richland Township «W.E. Upjohn Institute, 2006, (https://research.upjohn.org/cgi/viewcontent.cgi?referer=https://scholar.google.com/&httpsredir=1&article=1225&context=reports).
199 Cette estimation repose sur la spécification d’un modèle d’élasticité constante. À la demande de l’Institut Upjohn, la professeure Hite a testé la sensibilité de ces résultats et, dans toutes les spécifications, elle a trouvé un effet négatif important, statistiquement significatif de la proximité d’une gravière sur les prix des maisons. Les simulations pour le canton de Richland rapportées ci-dessous sont basées sur des estimations provenant de la spécification d’élasticité constante et produisent des impacts négatifs estimés un peu moins importants sur les valeurs des maisons que ceux basés sur des modèles employant d’autres formes fonctionnelles. Nous considérons ce nombre comme une estimation conservatrice.
200 L’analyse de l’étude n’était pas aussi sophistiquée que le modèle de Mme Hite, en ceci qu’elle a produit une estimation strictement linéaire de l’impact négatif de l’exploitation minière sur les prix des maisons. Le modèle de Mme Hite générait une estimation « arquée » plus réaliste qui diminue d’abord à un taux croissant, puis à un taux décroissant.
201 La professeure Hite n’a pas été rémunéré pour ses travaux, même s’ils étaient assez importants.
202 George S. Tolley, Effects of the Proposed Indeck Facility on Property Values, Land Use and Tax Revenues. Mai 2000, article non publié, page 6.
203 Kolala, C., Polyakov, M. et J. Fogarty, »Impacts of mining on property values in Kalgoorlie-Boulder, Western Australia « (2020) 68(C) Resources Policy.
204 Rosen, S., « Hedonic prices and implicit markets: product differentiation in pure competition » (1974) 82 (1) J. Polit. Econ. 34-55.
205 R: Core Team, » R: a language and environment for statistical computing » (2019) Foundation for Statistical Computing, Vienne, Autriche. (https://www.R-project.org/).
206 M & N Materials, Inc. v. Town of Gurley, Alabama, et al., United States District Court, Northern District of Alabama, Northeastern Division, 13 novembre 2015, (https://lanierford.com/images/NewsPDFs/federal-court-decision-gurley-alabama-quarry-case.pdf).