Un changement radical se prépare
Évaluation immobilière au Canada
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Un changement radical se prépare
Par Peter McLean, AACI, P. App., AIC President
Le besoin d’innovation au sein de la profession d’évaluateur est indéniable. Les professionnels de l’évaluation sont constamment mis au défi par leurs clients d’être plus efficaces, d’ajouter plus de valeur et de facturer des honoraires moins élevés. Cette réalité est particulièrement évidente dans le secteur du financement hypothécaire résidentiel, où les évaluations sont de plus en plus banalisées et où d’autres méthodes d’atténuation des risques émergent, qui pourraient être « assez bonnes » pour les prêteurs étant donné le faible risque historique de défaillance hypothécaire au Canada. Le conseil d’administration et le personnel de l’Institut canadien des évaluateurs (ICE) ont consacré beaucoup de temps à la recherche et à l’analyse de ces changements et à l’élaboration de stratégies permettant aux évaluateurs de continuer à prospérer dans cet environnement en pleine évolution. La technologie alimente ce changement et est l’un des principaux perturbateurs de l’industrie dans les secteurs financier et immobilier. Des modèles d’évaluation automatisée (MEA) de plus en plus sophistiqués, armés de données robustes et rehaussés par l’intelligence artificielle, peuvent désormais, dans certains cas, fournir des valeurs de marché fiables en quelques secondes. Les technologies émergentes sont de mieux en mieux acceptées par le grand public, qu’il s’agisse des services bancaires ouverts, des marchés de prêts en ligne ou de la technologie de la chaîne de blocs.
La concurrence au sein de l’industrie des prêts est également de plus en plus féroce, alors que les institutions financières non réglementées par le gouvernement fédéral sont sur le point d’améliorer leur part de marché aux dépens des « cinq grandes banques ». Les comportements changeants des consommateurs, en particulier ceux des « millénaires » qui entrent sur le marché immobilier, modifient les attentes à l’égard du processus hypothécaire, exigeant qu’il soit plus rapide et facilement accessible au moyen d’un appareil intelligent, le tout à un taux très concurrentiel. La loyauté des « millénaires » envers une banque traditionnelle n’est pas la même que celle des générations précédentes, ce qui permet à de nouvelles institutions aux « poches profondes » d’entrer dans l’industrie du crédit. Comme l’industrie des prêts hypothécaires continue d’être lucrative, de nouveaux modèles d’atténuation des risques sont offerts aux prêteurs. Certains fournisseurs ont commencé à offrir une « approche révolutionnaire en matière d’évaluation au Canada ». Ces firmes offrent divers produits d’évaluation – de l’évaluation à faible ratio à l’aide de MEA à l’évaluation sommaire ou sur ordinateur, en passant par l’évaluation complète qui engage des « techniciens sur le terrain » et, dans certains cas, des « évaluateurs agréés » – le tout à une fraction du temps, à un taux abordable et avec une assurance indemnisation unique pour atténuer le risque de l’évaluation immobilière. Si ce modèle, et d’autres semblables, sont acceptés par les organismes de réglementation et les « cinq grandes banques », l’impact sur la profession de l’évaluation résidentielle telle que nous la connaissons sera profond et aura un effet domino qui se fera également sentir dans les contrats de service d’évaluation non résidentielle.
Cette réalité du marché a incité l’ICE à engager proactivement son leadership national et provincial au moyen d’un atelier animé le 24 février. Le but de la discussion était de dégager les défis de l’ICE au sein d’un marché en évolution, de comprendre l’impact potentiel de ces défis sur l’ICE et sur les membres de l’ICE et de réfléchir à des solutions potentielles pour la viabilité et le succès futurs des membres de l’ICE.
Incidence des perturbateurs de l’industrie sur les membres de l’ICE
Au cours de la discussion en atelier, les participants ont convenu que les perturbateurs de l’industrie pourraient :
- Avoir un impact négatif important sur les évaluateurs résidentiels, en particulier ceux qui ne sont pas diversifiés et qui comptent uniquement sur les contrats de service de financement hypothécaire pour gagner leur vie. L’impact sur les évaluateurs résidentiels serait une diminution des honoraires, ainsi qu’une diminution des contrats de service d’évaluation du financement hypothécaire et d’autres évaluations résidentielles ponctuelles.
- Affecter les évaluateurs non résidentiels, mais à un rythme plus lent. Il pourrait y avoir une baisse de la demande d’évaluations ponctuelles et une augmentation des possibilités de devenir conseillers ou experts-conseils en immobilier en tirant parti d’autres normes professionnelles qui vont au-delà de la norme sur les biens immobiliers.
- Affecter les membres rémunérés, en particulier ceux qui se spécialisent dans la collecte de données au sein des grands organismes d’évaluation, qui risquent d’être évincés par la technologie. Cependant, il pourrait y avoir plus de possibilités d’interprétation et d’analyse des données et de positionnement en tant que consultants ou gestionnaires de projets immobiliers au sein de leur organisation.
- Avoir un impact sur les compétences requises par les stagiaires de l’ICE. L’éducation et la formation actuelles de l’ICE pourraient devoir être améliorées pour répondre adéquatement aux besoins du marché dans l’avenir. Les participants ont également discuté de la nécessité éventuelle de rediriger les stagiaires du volet CRA vers le volet AACI afin de s’assurer qu’ils disposent d’un plus grand éventail d’occasions d’évaluation.
Les participants ont discuté du fait que le succès futur des membres de l’ICE réside dans la diversification des compétences qu’ils acquièrent et des services qu’ils rendent. Ceux qui résistent à la diversification seront en danger. Les participants ont également indiqué que les Normes uniformes de pratique professionnelle en matière d’évaluation au Canada (NUPPEC) fournissent une souplesse et une orientation qui offrent aux membres de l’ICE d’importantes possibilités de diversification. On s’entend généralement pour dire que les membres doivent mettre à profit leur expertise en évaluation pour devenir des conseillers/spécialistes en immobilier, pour ajouter de la valeur par une analyse réfléchie des données, pour adopter la technologie qui les rendra plus efficaces et efficients et pour utiliser d’autres normes professionnelles afin de diversifier leur pratique.
Incidence des perturbateurs de l’industrie sur l’ICE
L’impact sur les membres aura également un impact symbiotique sur l’ICE aux niveaux national, provincial et local. Les participants ont convenu que, si les membres ne se diversifient pas, l’ICE court le risque de perdre des membres, ce qui entraînera une perte de revenus et une incapacité d’offrir le même niveau de programmes et services. Le nombre de bénévoles au sein des principaux comités pourrait diminuer de sorte qu’il y aurait lieu de procéder à une revue de notre structure organisationnelle pour assurer l’utilisation la plus efficiente et la plus efficace possible des ressources en personnel et de la technologie. Les normes professionnelles devront continuer de fournir une orientation sûre et adaptable et le programme d’assurance responsabilité professionnelle devra être revu pour en assurer la viabilité. La défense des intérêts et la communication de la proposition de valeur des membres aux intervenants est une activité importante que l’ICE doit continuer de livrer.
L’ICE du futur
On a demandé aux participants de faire un remue-méninges sur ce à quoi l’ICE devrait « ressembler » à l’avenir, compte tenu des défis et des opportunités que pourrait offrir le marché. Les idées ont été classées en plusieurs catégories : défense des intérêts, image de marque, diversification des services, formation de nouveaux partenariats, rationalisation de la gouvernance et des opérations de l’ICE, facilitation de l’innovation, souplesse et adaptabilité des membres, adoption de la technologie et prise en compte des besoins du marché dans le programme d’accréditation. Au fur et à mesure que l’ICE va de l’avant, plusieurs efforts clés ont été identifiés par les participants comme devant se poursuivre : publier et maintenir les NUPPEC, offrir un programme d’éducation de haute qualité, respecter les langues officielles du Canada, engager du personnel de qualité, défendre les intérêts de ses membres et promouvoir la valeur des membres de l’ICE aux intervenants.
Les participants ont aussi exprimé le désir de s’assurer que toutes les décisions futures ajoutent de la valeur aux membres de l’ICE, fournissent constamment des services et des messages partout au pays, offrent aux membres des occasions et des conseils pour diversifier et réussir et maintiennent une organisation transparente s’appuyant sur un processus d’autorégulation respecté. L’ICE doit se concentrer sur les services et les programmes qu’il peut offrir avec succès et ajouter de la valeur aux membres.
Recommandations
Sur la base des discussions en atelier, cinq recommandations ont été présentées à l’ICE pour un examen plus approfondi.
- L’ICE doit analyser divers scénarios de ce que l’évolution de la conjoncture de l’évaluation résidentielle signifie quant à son orientation future.
- Scénario 1 : L’ICE facilite la tâche des évaluateurs résidentiels qui choisissent de travailler dans le cadre de solutions viables d’atténuation des risques.
- Scénario 2 : L’ICE facilite la capacité des membres à répondre à l’évolution de la demande du marché dans le secteur du financement hypothécaire.
- Scénario 3 : L’ICE laisse les forces du marché déterminer le sort des évaluateurs résidentiels; l’ICE peut se concentrer sur les moyens de faciliter la réussite des membres en diversifiant leur expertise et en continuant à offrir de la valeur aux membres à un prix raisonnable. 2. L’ICE doit procéder à un examen de la structure de sa gouvernance et de son organisation pour assurer la prestation la plus efficiente et la plus efficace possible des services et des programmes.
3. L’ICE doit réorienter ses ressources afin de faciliter la capacité de ses membres à diversifier leurs services.
4. L’ICE doit explorer l’impact de la technologie sur la profession.
5. L’ICE doit revoir son programme d’éducation pour s’assurer qu’il reflète l’évolution des besoins du marché.
Prochaines étapes
Au cours de l’été et jusqu’à l’automne, l’ICE, sous la direction d’un groupe de travail nommé par le conseil d’administration (composé de hauts représentants des niveaux national et provincial), collaborera avec les membres de partout au pays afin de définir une voie claire pour notre organisation et pour la profession en général. Nous faisons face à ce qui constitue peut-être les plus grands défis de notre profession en 81 ans d’existence, mais je suis convaincu que nous sommes à la hauteur de la tâche. J’ai hâte de solliciter votre participation au processus.