Comment comprendre et surmonter nos partialités
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Conseil du président sur la diversité et l’inclusion
Par Ashita Chandra, B.Comm(H), Membre stagiaire de l’ICE, Agente immobilière, Musso Appraisals Inc., Ontario; et Andy Pham, BBA, AACI P. App., vice-président, Canadian Asset Management, BentallGreenOak, Sun Life Mortgages Investments, Colombie-Britannique
Vous avez des partialités implicites. La partialité n’est pas nécessairement une mauvaise chose. Ça ne veut pas dire que vous êtes raciste, sexiste, homophobe ou autre chose du genre. Ça signifie tout simplement que vous avez un cerveau et que vous êtes humain. Dans leur livre Blindspot: Hidden Biases of Good People, Mahzarin Banaji et Anthony Greenwald affirment : « Un comportement et/ou jugement partial est le résultat de processus cognitifs complexes qui se produisent sous le niveau conscient d’une personne, sans contrôle intentionnel ou conscient. Une partialité implicite a sa base dans le subconscient et peut se développer dans le temps à cause de l’accumulation naturelle d’expériences personnelles. »1
Nos cerveaux traitent des milliards de stimuli par jour et doivent choisir rapidement ce sur quoi ils doivent se concentrer. Les renseignements recueillis sont utilisés pour assurer la survie, faire des inférences ou dresser des catégories et ressentir des émotions qui nous attirent vers certaines personnes. Parce que nos cerveaux traitent des milliards de stimuli, notre conscient n’est pas en mesure d’interpréter tout ce que nous voyons. 2
Votre première impression d’une situation peut ne pas être basée sur une interprétation complète des faits ou images devant vous en raison des quantités énormes d’informations qui vous parviennent en tout temps. Par conséquent, notre « première impression » inclut souvent des partialités quelconques que nous n’avons pas consciemment « pensées » mais que nos cerveaux ont classées inconsciemment pour faire la synthèse des énormes quantités d’informations présentées. Par exemple, il vous suffit de vous brûler une seule fois pour développer une réaction rapide et instinctive au feu. Ces réactions émotives sont dues à l’instinct de survie de votre cerveau.2
Avec le temps, la socialisation d’une personne, ainsi que ses souvenirs, produisent des partialités implicites qui sont appliquées lorsque le cerveau entreprend de définir efficacement et inconsciemment les stimuli qui se présentent. Il n’est pas rare que ces réponses de survie se traduisent en situations avec des personnes avec lesquelles nous avons des contacts limités et nous commençons à classer rapidement les nouveaux venus dans notre cercle de connaissances selon qu’ils sont « comme moi » ou « pas comme moi ».
Nos partialités ne sont pas toutes négatives ou blessantes. La difficulté, cependant, réside dans la nature problématique de nos partialités implicites (ou nos angles morts), car elles peuvent opérer en dehors de notre conscience, tout en ayant un impact sur les décisions que nous prenons et les choses que nous faisons.
La première réaction de beaucoup de gens à cette notion que nous avons tous des partialités est « Non, pas moi ». Vous vous dites peut-être : « J’ai eu des amis noirs/bruns/indigènes en grandissant » ; « J’ai grandi dans une famille ou un quartier où la diversité et l’inclusion faisaient partie de nos valeurs fondamentales » ; « Je suis une minorité ou une personne racialisée, je ne peux pas avoir de préjugés puisque j’ai fait l’expérience des effets négatifs des préjugés et des stéréotypes » ; « Je suis une femme, comment puis-je avoir des préjugés contre d’autres femmes » ; ou « Les êtres humains sont de mauvais examinateurs, sujets aux superstitions, aux préjugés et à une tendance profonde à voir ce qu’ils veulent voir plutôt que ce qui est réellement là ». – M. Scott Peck
Mais nous avons tous des partialités implicites. Il s’agit de stéréotypes appris qui sont automatiques, involontaires et profondément ancrés dans nos croyances et notre vision du monde. Par exemple, si vous êtes coincé dans un parc de stationnement avec un pneu crevé, il est fort probable que vous vous adressiez à un homme plutôt qu’à une femme si vous avez besoin d’aide pour le changer. Bien que cette partialité implicite puisse sembler innocente, des problèmes peuvent survenir lorsque ce type de partialité se manifestent au travail et dans d’autres aspects de nos vies.
Comment nos partialités implicites nous affectent-elles?
Les partialités affectent de nombreux aspects de notre vie et beaucoup d’entre elles sont associées à des stéréotypes : les personnes âgées sont trop critiques, les jeunes sont trop immatures, etc.
La question des stéréotypes raciaux et des partialités implicites, par exemple, a récemment fait la une des journaux canadiens et américains, avec d’innombrables histoires de policiers associant la criminalité aux Noirs ou aux Autochtones et agissant en fonction de ces préjugés – parfois avec des conséquences mortelles.
Cependant, les partialités implicites ne sont pas réservées à la race ou au sexe. Nous observons des partialités implicites dans de nombreux endroits, à propos de nombreuses caractéristiques, notamment l’âge, la religion, le poids, l’apparence, les handicaps, les accents, l’identité sexuelle, la sexualité, les parents célibataires, les mères (ou pères) au foyer, les enfants aux cheveux roses, les personnes tatouées et percées, les personnes portant certains autocollants sur leur voiture, et la liste est longue.
Pourquoi devrions-nous nous préoccuper de nos partialités?
En tant que professionnels de l’évaluation, ces partialités peuvent avoir un impact sur la manière dont nous traitons nos clients, dont nous interagissons avec nos collègues, et même sur la manière dont nous évaluons les données recueillies pour un rapport que nous sommes en train de rédiger. Nous devons veiller à ce que les décisions que nous prenons soient fondées sur des faits et non sur des partialités implicites dont nous ne sommes peut-être même pas conscients.
Dans un environnement de travail, les partialités implicites peuvent affecter les décisions d’embauche et de promotion, les affectations de travail et les parcours professionnels, et peuvent parfois donner lieu à des environnements de travail hostiles. Ces partialités peuvent également nuire aux relations et affecter la réputation des entreprises.
Les partialités se répètent tout au long de la vie d’une personne dans une grande variété de contextes et peuvent être incroyablement douloureux pour les victimes. Les personnes soumises à des partialités positives voient souvent les portes s’ouvrir pour elles, tandis que les personnes soumises à des partialités négatives doivent, au mieux, ouvrir la porte elles-mêmes, ou, au pire, la trouver verrouillée ou se faire claquer la porte au nez.
Et lorsque des personnes appartenant à des groupes d’identité sociale particuliers, comme les femmes ou les Canadiens racialisés, sont largement et constamment soumises à des partialités négatives, cela crée des disparités systémiques dans tous les domaines de la société, comme l’éducation, l’emploi, les soins de santé, le logement, etc.
Comment reconnaître et interrompre nos propres partialités?
Il existe, bien sûr, des mesures que vous pouvez prendre pour éviter les partialités implicites. Voici quelques moyens de réduire vos propres partialités implicites et d’éviter qu’elles n’influencent vos prises de décision.
1. Reconnaissez vos partialités implicites/stéréotypes de remplacement
Commencez à réfléchir aux partialités implicites que vous pouvez avoir. Quelles décisions avez-vous prises concernant des personnes sans vraiment y réfléchir ? Demandez-vous pourquoi vous avez pris cette décision.
Par exemple, vous pensez peut-être que les hommes et les femmes sont tout aussi capables de diriger, mais vous pensez que les hommes ne sont pas capables de faire preuve d’empathie comme les femmes, et vous avez donc choisi une femme pour un rôle qui, vous le saviez, nécessitait de l’empathie. Bien que cela puisse ne pas sembler négatif, les décisions doivent être prises en fonction de la personne qui convient le mieux au rôle à jouer, et non en fonction du sexe que vous percevez comme le plus compétent.
Plus nous nous convainquons de notre « impartialité », plus nous sommes aveugles lorsqu’il s’agit de reconnaître nos partialités implicites. Un bon point de départ consiste à passer les tests d’association implicite de Harvard (Project Implicit)3, destinés à aider les gens à identifier leurs partialités.
En bref, il s’agit de « penser au stéréotype que vous entretenez et de le remplacer consciemment par des informations exactes » 4.
2. Concentrez-vous sur les personnes
Plutôt que de penser aux caractéristiques de l’ethnie, du sexe ou de la classe sociale d’une personne, concentrez-vous sur elle en tant qu’individu. Accordez-lui du mérite sur la base des preuves que vous voyez devant vous, au lieu de vous fier à votre intuition ou à votre « instinct » (souvent déguisé en vos propres partialités).
3. Augmentez l’exposition aux partialités
Une fois que vous avez identifié vos partialités, essayez de vous y exposer plus régulièrement. Si vous cherchez à prouver que vos partialités sont fausses, cela peut avoir un impact positif sur votre comportement.
Quelques trucs pour minimiser l’influence des partialités et suppositions
- 1. Consacrez suffisamment de temps à l’évaluation de vos informations. Des études ont démontré que les personnes occupées ou distraites par d’autres tâches laissent leurs partialités prendre le dessus. Une contre-mesure efficace consiste à ralentir, à faire passer votre pensée des parties primitives et réactives du cerveau à des niveaux plus réfléchis5.
- Appliquez les critères de manière cohérente pour évaluer toutes les données recueillies. La recherche montre que des normes différentes peuvent être utilisées pour évaluer des candidats de différentes distinctions.
- Évaluez l’ensemble des données. Ne vous fiez pas trop à un seul élément des données pour tirer des conclusions.
- Introduisez des frictions dans le système. Remettez en question les raisons de l’évaluation des données. Prenez-vous le temps de vous arrêter et de réfléchir aux données?
- Évaluez périodiquement vos jugements et demandez-vous si des biais d’évaluation influencent vos décisions. Posez-vous des questions difficiles telles que : Est-ce que j’utilise des normes différentes pour évaluer des candidats différents? Est-ce que j’évalue injustement les candidats sous-représentés malgré les preuves du contraire?
Introduire l’allié dans la conversation
« Heureusement, pour les esprits sérieux, un préjugé reconnu est un préjugé stérilisé. » (Benjamin Haydon)
Bien que nous devions être prêts à identifier et à interrompre nos propres partialités, nous devons également reconnaître et être prêts à interrompre les partialités chez les autres. C’est probablement la partie la plus difficile et la plus inconfortable de la lutte contre les partialités implicites.
Dans nos relations avec autrui, le défi consiste à décider quand dire quelque chose, comment le dire et à qui. Vous pouvez toujours faire l’effort de ne pas aborder les partialités d’une autre personne devant d’autres personnes, mais plutôt essayer de trouver un endroit pour parler en privé, et peut-être commencer la conversation sans faire de reproches. Si quelqu’un n’est pas conscient de ses partialités, celles-ci continueront à faire souffrir une autre personne ou un groupe de personnes et pourraient entraîner des problèmes importants à l’avenir. Si vous voyez quelque chose, dites-le, d’une manière qui sait tenir compte des sentiments de toutes les parties concernées.
Surmonter et traiter les partialités est un travail de toute une vie qui ne se fait pas du jour au lendemain, que ce soit au niveau individuel, institutionnel ou sociétal. Cependant, nous pouvons nous consoler avec cette citation de Jennifer Eberhardt : « Il y a de l’espoir dans le simple fait de réfléchir. C’est là que réside le pouvoir et que le processus commence. » 6
Pour en savoir plus sur ce sujet, veuillez consulter la section des ressources sur la page Web du Conseil sur la diversité.
Notes en fin de texte
1- Banaji, Mahzarin R., et Anthony G. Greenwald. Blindspot: Hidden Biases of Good People
2- Advantages of bias and prejudice: an exploration of their neurocognitive templates, A Tobena 1, Marks, R Dar
3 –https://implicit.harvard.edu/implicit/selectatest.html – Take a Test – Project Implicit – Harvard University
4 – https://www.chairs-chaires.gc.ca/program-programme/equity-equite/bias/module-eng.aspx