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Le mot d’ordre dans le milieu de l’immobilier commercial en 2015 : changement!

Évaluation immobilière au Canada

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2015 – Volume 59 – Tome 1
Le mot d’ordre dans le milieu de l’immobilier commercial en 2015 : changement!
Ross J. Moore, Paul Morassutti

Par Ross J. Moore, Directeur de la recherche, Canada, CBRE Limited, Global Research and Consulting, Vancouver, et Paul Morassutti, AACI, P. App., Vice-président exécutif et directeur exécutif, CBRE, Toronto

On dit que dans le monde d’aujourd’hui, la seule constante est le changement. Cet adage semble plus approprié que jamais au sein du marché de l’immobilier commercial du Canada. Les habitudes de consommation changeantes, les habitudes de navettage, l’émergence de la cohorte post-boomer branchée, l’explosion de projets de construction de copropriétés dans les centres-villes et les taux d’intérêt si faibles qui ne rapportent presque rien changent tout ce que nous, intervenants du milieu immobilier, avons pris pour acquis; les récents événements suggèrent que ce n’est que le début.

Location et investissement

L’immobilier commercial se résume essentiellement à deux éléments : la location et l’investissement. Ceux-ci sont inextricablement liés; l’un dicte l’autre et vice-versa. Au Canada, les marchés de location ont, en règle générale, prospéré au cours des dernières années après avoir réussi à se sortir de la crise financière mondiale. Les années favorables se sont poursuivies jusqu’en 2014, mais actuellement, des fissures commencent à apparaître. Nous observons une vague de construction de locaux commerciaux qui, ensemble, offriront 20 millions de pieds carrés d’espaces à bureaux majoritairement au centre-ville à une époque où les occupants diminuent leur superficie, dans la mesure du possible, et une économie fondée sur les ressources naturelles qui n’a plus le vent dans les voiles depuis la fin abrupte du super cycle des matières premières à la fin de 2013. La chute récente des prix du pétrole (et du gaz naturel) représente la cerise sur le gâteau, pour ainsi dire. Dans une certaine mesure, les entreprises technologiques locataires sont venues à la rescousse, bien que leurs préférences en matière de locaux à bureaux puissent être décrites comme éclectiques; les propriétaires ne peuvent donc pas s’attendre à ce qu’elles optent pour un certain type de location ou d’édifice (nouveau, vieux, haut, peu élevé, etc.). Cette situation porte donc facilement à la confusion et faire des commentaires généraux s’avère impossible. À mesure que l’année avance, avec la déconfiture qui se produit dans de nombreux marchés des matières premières, nous pourrons mieux évaluer les répercussions d’une économie un peu moins solide et d’un marché du travail plus tiède sur les marchés de la location.

Commerce de détail

À l’instar des locaux à bureaux, le commerce de détail subit à l’heure actuelle des changements importants, notamment l’arrivée et le départ de Target. Celui-ci devait servir de modèle pour un nouveau type de petit magasin à grande surface essentiel à la survie de nombreux petits centres commerciaux canadiens. Hélas, ce ne sera pas le cas et la fermeture de Target a remis en question la viabilité de plusieurs centres commerciaux, en particulier dans les petits marchés en dehors des principales agglomérations canadiennes.

La boutique Nordstrom a fait son entrée sur le marché canadien, et ce sera bientôt au tour de Saks Fifth Avenue. Les locataires majeurs ont toujours la possibilité de révolutionner le commerce de détail, mais le commerce en ligne, ou commerce électronique, continue de perturber le milieu et force tous les détaillants à adopter l’approche des plateformes multiples afin de satisfaire les besoins de leurs clientèles. Cette situation favorise des échanges intéressants entre le commerce de détail et le marché industriel.

Le commerce de détail a longtemps été caractérisé par de faibles taux d’inoccupation et, avec la disparition de Target, ils sont voués à l’augmentation. Cependant, les fondements ne changeront pas de façon importante, car il est sous-entendu dans le commerce de détail que les affaires ne se mènent pas de la même manière qu’ailleurs. Les détaillants et les propriétaires en sont conscients et cherchent de nouveaux moyens innovateurs pour maintenir l’achalandage en magasin et accroître les ventes. Cette industrie, déjà très concurrentielle, le sera davantage au cours des prochaines années.

Marché industriel

Le marché industriel canadien, qui totalise 1,7 milliard de pieds carrés, ne bouge pas rapidement, mais même des changements surviennent au sein de cette catégorie d’actifs habituellement statiques. Les utilisateurs souhaitent tirer davantage profit de leur espace et, par conséquent, des progrès en matière d’empilement, d’installations de transbordement et d’automatisation sont observés, et des centres d’exécution de commandes, semblables à ceux aux États-Unis, mais à taille réduite, commencent à faire leur apparition. Les détaillants canadiens, en particulier les grands épiciers, investissent énormément dans de nouveaux centres de distribution (CD) en vue de la nouvelle concurrence que Target devait faire, mais aussi de celle de Wal-Mart, qui continue d’augmenter ses activités au moyen de grands magasins de type super centre, qui comporte d’ailleurs une épicerie. Les CD de nouvelle génération ne sont pas exclusifs aux chaînes d’épicerie; ils se retrouvent en effet dans tous les segments de commerce. La gestion de la chaîne d’approvisionnement est devenue le nouveau champ de bataille des détaillants. On peut attribuer cette situation à un large éventail de facteurs, mais la technologie en est grandement responsable. La demande de locaux d’entrepôt est généralement élevée mais, de nos jours, elle provient la plupart du temps de grands utilisateurs en raison des nouveaux projets de construction, dont 80 % d’entre eux possèdent une superficie d’au moins 100 000 pieds carrés.

Investissement

Comment évolue le marché des investissements parmi ces changements? Les investisseurs semblent toujours inébranlables, car ils croient fermement que le marché immobilier canadien constitue un excellent marché où investir et que le capital demeure facilement accessible. Le volume des investissements reste élevé, du moins comparativement aux normes historiques, bien que les douze derniers mois ont été caractérisés par de rares grosses transactions, mais plutôt par des transactions moyennes en deçà de 25 millions de dollars. Les transactions d’intérêts minoritaires, en particulier pour les actifs de plus de 50 millions de dollars, constituent désormais la règle plus que l’exception. Les transactions foncières, dans le but d’y construire une propriété résidentielle, continuent d’occuper une part essentielle du marché, et témoignent de la fusion des marchés commercial et résidentiel, ainsi que des défis d’évaluation qui s’y rattachent.

Établissement des prix

Cela nous amène à l’établissement des prix. Compte non tenu de la qualité, du type de propriété et de la région, les prix élevés subsistent. En raison de l’incertitude engendrée par la récente chute des prix du pétrole, on ressent maintenant un certain sentiment d’incertitude qui n’était pas là avant. Les faibles taux d’intérêt, qui ont atteint des creux inégalés, permettent d’amortir les pertes, et si le prix du baril de pétrole se stabilise entre 50 $ et 60 $, le taux plafond pourrait être revu à la baisse. Le marché des investissements se distingue encore par son mélange habituel de capitaux institutionnels, publics et privés, mais avec la récente baisse du dollar canadien, surtout par rapport au dollar américain, la hausse éventuelle de capitaux américains n’est pas hors de question. 

Beaucoup de changements en effet. Le marché de l’immobilier commercial canadien fait encore l’envie de la plupart des marchés mondiaux, mais, sans aucun doute, un chapitre s’est clos et un nouveau s’apprête à commencer. Pensez au changement, partout et dans tout, y compris le vieux marché ennuyeux de l’immobilier.