Vue d’ensemble des lois sur l’expropriation en matière d’indemnisation au Canada : Expériences et recommandations
Évaluation immobilière au Canada
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Par Gordon MacNair, SR/WA, É. PRO., AACI
INTRODUCTION
L’expropriation, c’est-à-dire le pouvoir du gouvernement de prendre une propriété privée pour l’utiliser à des fins publiques, est un outil essentiel pour le développement des infrastructures au Canada. Fort d’une quarantaine d’années d’expérience dans le domaine de l’immobilier d’infrastructure, j’ai été confronté à diverses lois sur l’expropriation dans l’ensemble du pays. Cet article cherche à donner un aperçu de ces lois en ce qui concerne l’indemnisation, à partager mes idées, à discuter des tendances en matière de droit de l’expropriation et à suggérer des améliorations possibles de la législation canadienne sur l’expropriation.
TERMES ET CONCEPTS CLES DANS LE DOMAINE DE L’EXPROPRIATION
Rachats totaux et prises de possession partielles
L’expropriation peut prendre la forme d’un rachat total, c’est-à-dire l’acquisition de l’ensemble de la propriété, ou d’une prise de possession partielle, c’est-à-dire de l’acquisition d’une partie seulement de la propriété. Ces deux scénarios présentent des défis uniques et nécessitent un examen minutieux de divers facteurs lorsqu’il s’agit de projets immobiliers d’infrastructure.
La plus grande parcelle dans le cadre de l’expropriation
Le concept de la plus grande parcelle fait partie intégrante des évaluations d’expropriation, car il sert de base à la détermination d’une juste indemnisation lorsqu’une partie d’une propriété est expropriée. Ce concept englobe l’ensemble de la propriété détenue par l’individu avant toute expropriation et nécessite une connaissance approfondie de la propriété, tant du point de vue juridique que du point de vue de l’évaluation. La question clé à poser est la suivante : La partie de la propriété expropriée provient-elle d’une propriété individuelle ou fait-elle partie d’une plus grande propriété assemblée (la plus grande parcelle)?
Trois critères pour déterminer s’il s’agit d’une plus grande parcelle :
- Unité de titre (propriété) : Ce test permet d’évaluer si le bien est détenu par un seul propriétaire. Il s’agit de savoir si les parcelles en question appartiennent à la même personne ou entité. Il s’agit d’un facteur essentiel pour déterminer si elles peuvent être considérées comme une seule grande parcelle.
- Unité de contiguïté (contiguës ou séparées) : Ce test permet de déterminer si les parcelles sont physiquement reliées ou si elles fonctionnent comme une seule unité économique. Les parcelles qui sont contiguës ou qui fonctionnent ensemble comme une unité cohésive ontplus de chances d’être considérées comme faisant partie d’une seule parcelle.
- Unité d’utilisation (sous une seule utilisation optimale) : Ce test permet d’évaluer si les parcelles sont utilisées ensemble pour atteindre l’utilisation optimale. Si les parcelles servent un objectif unifié qui maximise leur valeur économique, elles sont considérées comme faisant l’objet d’une seule et même utilisation optimale, formant ainsi une seule et même grande parcelle.
Ces critères permettent de définir la grande parcelle et d’éclairer les décisions d’indemnisation en cas d’expropriation, en garantissant des évaluations complètes et équitables. Bien que ces critères ne soient pas explicitement détaillés dans la législation en matière d’expropriation, des indications peuvent être tirées des commentaires de certaines lois sur l’expropriation dans les sections relatives à l’affection préjudiciable. Par exemple, l’article 30(2) du Manitoba, l’article 21 de l’Ontario et l’article 3 (h)(i) de la Nouvelle-Écosse fournissent souvent un contexte, par exemple : « Aux fins de la présente clause, une partie des terres d’un propriétaire est réputée avoir été acquise lorsque le propriétaire dont les terres sont acquises conserve des terres contiguës à celles qui ont été acquises ou conserve des terres dont l’utilisation est améliorée par une propriété unifiée avec celles qui ont été acquises. (Soulignement ajouté)
Implications juridiques et d’évaluation
Il est essentiel de comprendre les trois tests relatifs à la parcelle la plus grande, tant du point de vue juridique que du point de vue de l’évaluation.
- Du point de vue juridique : D’un point de vue juridique, ces tests permettent de définir l’étendue de ce qui constitue la grande parcelle, ce qui oriente les décisions relatives à l’indemnisation en cas d’expropriation. Ils garantissent que l’ensemble de la propriété, telle qu’elle est comprise dans le cadre juridique, est prise en compte lors de la détermination de l’indemnité, protégeant ainsi les droits du propriétaire.
- Du point de vue de l’évaluation : Du point de vue de l’évaluation, ces tests garantissent une évaluation complète qui prend en compte tous les aspects pertinents du bien. En évaluant minutieusement l’unité du titre, la contiguïté et l’utilisation, les évaluateurs peuvent fournir une estimation juste et précise de la valeur du bien, conduisant à une compensation équitable pour le propriétaire.
En conclusion, le concept de la plus grande parcelle et les tests qui y sont associés jouent un rôle essentiel dans les évaluations d’expropriation, en contribuant à garantir que les propriétaires reçoivent une indemnisation juste et complète pour leurs terres expropriées.
Valeur de la partie prélevée
Partie prélevée : La partie spécifique de la propriété requise pour l’usage public est la partie prélevée. Ce terme, parfois appelé « la prise » ou « l’exigence », fait partie de la parcelle plus grande. Bien que certains organismes publics évitent d’utiliser le terme « prise »,
il s’agit d’un terme exact puisque l’organisme a recours à des actes d’expropriation pour acquérir des droits de propriété, sous réserve d’une indemnisation. Parmi les exemples de définition de la valeur marchande, on peut citer l’article 27(1) du Manitoba, l’article 27(2) de la Nouvelle-Écosse, l’article 32 de la Colombie-Britannique, l’article 41 de l’Alberta et l’article 14(1) de l’Ontario. En règle générale, au Canada, le propriétaire est payé pour la partie prise. Toutefois, il pourrait y avoir une exception à cette règle en vertu de l’article 44 (1.1) de la loi sur l’expropriation de la Colombie-Britannique (BC Expropriation Act).
Affection préjudiciable
Affection préjudiciable : L’affection préjudiciable fait référence à la réduction de la valeur des terres restantes résultant d’une expropriation ou d’une prise de possession partielle. On la trouve dans des lois telles que MB s.30(1), NS s.30(1), ON s.21, et AB s.56. Ce concept est essentiel pour garantir que les propriétaires seront indemnisés équitablement, non seulement pour le terrain pris, mais aussi pour l’impact négatif sur le reste de la propriété de la prise ou des travaux pour lesquels le terrain a été pris. Voici quelques exemples :
- Enclavement : Lorsqu’une parcelle de terrain est laissée sans accès en raison de l’expropriation des terrains adjacents.
- Perte de stationnement : Réduction ou élimination des places de stationnement, ce qui a un impact sur l›utilité et la valeur de la propriété restante.
- Perte d’accès : La modification des voies d’accès peut rendre le terrain restant moins accessible, ce qui réduit son utilité et sa valeur.
- Changement de forme : Les modifications de la forme de la parcelle restante peuvent limiter son potentiel de développement et sa fonctionnalité globale.
- Perte d’exposition et de visibilité : La réduction de la visibilité ou de l’exposition, en particulier pour les propriétés commerciales, peut diminuer considérablement leur valeur.
Cadre juridique : Dans les juridictions où des lois sur l’expropriation sont en vigueur, les autorités statutaires sont généralement tenues d’indemniser les propriétaires fonciers pour les pertes ou les dommages causés par une affection préjudiciable. Cela permet de s’assurer que les propriétaires ne sont pas désavantagés par la prise partielle de leurs terres.
Réclamations sans prise de possession : Il est intéressant de noter que dans certaines juridictions, une demande d’indemnisation pour affection préjudiciable peut être faite même s’il n’y a pas eu de prise de terre. Cela met en évidence la vaste portée de ce concept pour protéger les droits des propriétaires et garantir une indemnisation équitable pour tout impact négatif sur leur propriété. Les exemples incluent l’article 31(1) du Manitoba, l’article 41(2) de la Colombie-Britannique, l’article 1(b) de l’Ontario et l’article 1(b) du Nouveau-Brunswick. Il convient de noter que la législation de l’Alberta ne prévoit pas cette possibilité.
La compréhension de l’affection préjudiciable est cruciale pour les professionnels du droit et de l’évaluation impliqués dans les affaires d’expropriation. Elle permet de prendre en compte l’ensemble des facteurs affectant la valeur d’un bien et de garantir une indemnisation équitable aux propriétaires concernés.
Dommages-intérêts pour perturbations
Définition et objectif : les dommages-intérêts pour troubles visent à indemniser les propriétaires et les locataires pour les désagréments et les perturbations causés par une expropriation. Ce type d’indemnisation couvre un large éventail de réclamations pouvant découler de la procédure d’expropriation. Selon la Loi sur les expropriations de l’Ontario, les dommages-intérêts pour troubles sont définis comme « les coûts raisonnables qui sont les conséquences naturelles et raisonnables de l’expropriation ».
Composantes clés : La définition au sens large des dommages-intérêts pour troubles comprend généralement certains des éléments suivants qui sont inclus pour les propriétaires.
- Indemnité pour inconvénients : Certaines juridictions prévoient une indemnité pour inconvénients de 5 % de la valeur marchande lorsque l’expropriation concerne la résidence du propriétaire. Cette mesure tient compte de l’impact personnel et émotionnel de l’expropriation sur les propriétaires.
- Frais de déménagement et de réinstallation : Cette indemnité couvre les coûts liés au déménagement et à la réinstallation des propriétaires, y compris le coût des logements temporaires. Cela permet de s’assurer que les propriétaires ne sont pas financièrement accablés par la nécessité de trouver un nouveau lieu pour vivre ou exploiter leur entreprise.
- Frais juridiques et d’arpentage : Les coûts des services juridiques et d’arpentage requis dans le cadre de la procédure d’expropriation sont également couverts. Il s’agit des frais de représentation juridique, de préparation des documents et d’arpentage des propriétés.
Cadre législatif : Les définitions et les dispositions relatives aux dommages-intérêts pour cause de perturbation peuvent varier d’une juridiction à l’autre. L’objectif commun est de veiller à ce que les propriétaires soient indemnisés équitablement pour tous les coûts raisonnables encourus en raison de l’expropriation.
Il est essentiel pour les propriétaires et les professionnels impliqués dans les affaires d’expropriation de comprendre les dommages-intérêts pour cause de perturbation. Elle permet de s’assurer que toutes les parties sont conscientes de la nature globale de l’indemnisation disponible et aide à négocier des règlements équitables qui tiennent compte de l’impact total de l’expropriation sur les propriétaires.
Avantages généraux et particuliers en cas d’expropriation
Dans le contexte de l’expropriation, la distinction entre les avantages généraux et particuliers est cruciale pour déterminer la juste compensation. Ces avantages reflètent l’impact des projets d’infrastructure publique et des améliorations connexes sur la valeur des propriétés.
Les avantages généraux se réfèrent aux améliorations qui profitent à la communauté dans son ensemble et qui peuvent indirectement augmenter la valeur des biens immobiliers. Ces avantages sont généralement associés à des projets d’infrastructure publique plus vastes ou à des améliorations communautaires qui ont un impact positif sur l’environnement général dans lequel se trouvent les biens immobiliers. En voici quelques exemples :
- Construction de nouveaux parcs ou espaces verts : Ces aménagements améliorent la qualité de vie de l’ensemble de la communauté, rendant la zone plus attrayante et désirable.
- Amélioration des systèmes de transport public : L’amélioration des options de transport peut accroître l’accessibilité et la commodité, ce qui profite à l’ensemble de la population.
- Amélioration des services publics : La modernisation des services publics tels que l’eau, l’électricité et les réseaux d’égouts peut améliorer le niveau de vie et attirer de nouveaux résidents ou de nouvelles entreprises.
Bien que ces améliorations n’affectent pas directement une propriété individuelle, elles contribuent à rendre l’ensemble de la zone plus attrayante et désirable, ce qui entraîne une augmentation indirecte de la valeur des propriétés.
Les avantages particuliers sont des avantages directs pour le bien restant qui résultent de l’expropriation ou des améliorations de l’infrastructure qui y sont liées. Ces avantages ont un impact plus immédiat et plus tangible sur la valeur de la propriété. En voici quelques exemples :
- Amélioration de l’accessibilité : La construction de nouvelles routes ou l’amélioration de la circulation peuvent rendre un bien immobilier plus accessible, ce qui en accroît l’utilité et l’attrait.
- Amélioration directe de l’infrastructure : La modernisation des services publics ou des systèmes de drainage améliore directement la fonctionnalité et le rendement d’un bien immobilier.
- Augmentation de l’exposition ou de la visibilité : Les changements dans l’utilisation des terrains environnants ou dans l’infrastructure qui améliorent la visibilité du bien immobilier peuvent attirer davantage de clients ou de locataires, ce qui augmente sa valeur.
Les avantages particuliers ont un impact positif sur la valeur du bien immobilier en améliorant sa fonctionnalité, son accessibilité ou son attrait général. Il s’agit souvent de la compensation, que l’on retrouve dans diverses lois telles que l’article 32 du Manitoba, l’article 23 de l’Ontario, l’article 48 du Nouveau-Brunswick et l’article 32 de la Nouvelle-Écosse, mais la compensation ne s’applique généralement qu’à l’affection préjudiciable; toutefois, certaines juridictions, comme la Colombie-Britannique, autorisent la compensation du « montant de l’indemnité payable » et ne limitent pas la compensation à l’affection préjudiciable. Cela s’écarte en effet de l’approche la plus courante qui consiste à limiter la compensation à l’affection préjudiciable.
Considérations juridiques
Dans le contexte de l’expropriation, il est essentiel de faire la distinction entre les avantages généraux et les avantages particuliers pour déterminer la juste compensation.
- Avantages généraux : Généralement considérés comme profitant à l›ensemble de la communauté, ils ne sont généralement pas pris en compte dans les demandes d›indemnisation individuelles, car leur impact est diffus et généralisé. Il existe une exception à cette règle en vertu de l›article 44 (1) de la loi sur l›expropriation de la Colombie-Britannique (BC Expropriation act.)
- Avantages particuliers : Directement liés à la propriété restante, ils doivent être pris en compte lors de l’évaluation de l’indemnité d’expropriation. Les propriétaires ont droit à une indemnité qui reflète les effets négatifs sur leur propriété tout en tenant compte des effets positifs des avantages particuliers.
La compréhension de ces concepts permet de s’assurer que les propriétaires reçoivent une indemnisation appropriée pour les effets négatifs sur leur propriété tout en tenant compte des effets positifs résultant de l’expropriation et des améliorations qui en découlent. En faisant la distinction entre les avantages généraux et les avantages particuliers, les évaluateurs et les juristes peuvent garantir une procédure d’indemnisation juste et équitable pour les propriétaires concernés.
La relocalisation : Une perspective comparative
La relocalisation est un aspect essentiel de l’expropriation. Au Canada, le processus de rachat total peut varier considérablement de ce qui se fait aux États-Unis en vertu de la loi fédérale Uniform Relocation Assistance and Real Property Acquisition Policies of 1970 Act (URA). Il est essentiel de comprendre ces différences pour garantir un traitement équitable et un soutien adéquat aux propriétaires déplacés.
Dans le cas d’un rachat total, les deux pays fournissent une aide financière telle que le paiement de la valeur marchande ainsi que des frais de réinstallation. Toutefois, l’URA prévoit également des « services de conseil » dans le cadre desquels les propriétaires déplacés bénéficient d’une aide pour trouver des solutions de logement en vue de leur réinstallation. Ce type de service n’est pas prévu par la législation canadienne sur l’expropriation.
La Commission de réforme du droit de l’Ontario a rédigé un rapport sur la base d’indemnisation en cas d’expropriation en 1967. À la page 11 de ce rapport, on peut lire ce qui suit : « En outre, il faut s’efforcer de perturber le moins possible la vie des citoyens. L’indemnité doit être telle qu’elle lui permette de retrouver une vie normale. Non seulement il doit recevoir la valeur monétaire de sa perte, mais le gouvernement doit s’efforcer d’assurer une transition en douceur, par le biais d’une aide à la réinstallation, financière ou autre. »
Certaines agences gouvernementales aident les propriétaires dans leurs déménagements respectifs, mais ce n’est pas obligatoire et, par conséquent, de nombreuses agences ne fournissent pas ce service, ce qui est regrettable. Lorsqu’une personne doit quitter son logement, cela peut être une expérience très stressante pour elle, ce qui doit être reconnu tout au long de la procédure d’expropriation.
L’aide à la réinstallation peut atténuer considérablement le stress et les perturbations causés par l’expropriation. L’absence de services consultatifs obligatoires au Canada contraste avec l’approche plus complète adoptée dans le cadre de l’URA aux États-Unis. Cette différence met en évidence un domaine clé dans lequel la législation canadienne en matière d’expropriation pourrait être améliorée afin d’assurer une transition plus douce et plus favorable pour les propriétaires déplacés.
En conclusion, l’intégration d’une aide obligatoire à la réinstallation, y compris des services de conseil, dans la législation canadienne sur l’expropriation pourrait contribuer à atténuer les effets négatifs du déplacement et aider les propriétaires à trouver un nouveau logement convenable. Cette approche serait conforme aux principes énoncés par la Commission de réforme du droit de l’Ontario et contribuerait à une procédure d’expropriation plus humaine et plus équitable.
Valeur marchande et valeur pour le propriétaire
Valeur marchande : La valeur marchande correspond au prix de vente d’un bien sur le marché libre. Cette mesure objective est la norme d’indemnisation dans de nombreux cas d’expropriation au Canada. Elle reflète le montant qu’un acheteur consentant paierait à un vendeur consentant sur un marché concurrentiel et ouvert, en tenant compte de tous les facteurs juridiques et réglementaires. Ce concept est largement adopté par le gouvernement fédéral, la plupart des provinces et tous les territoires. La valeur marchande est déterminée
par :
- Les données de ventes comparables ;
- les conditions du marché au moment de l’évaluation ;
- les caractéristiques physiques et les attributs juridiques du bien.
Valeur pour le propriétaire : La valeur pour le propriétaire reconnaît la valeur subjective qu’un bien immobilier a pour son propriétaire, qui peut être supérieure à sa valeur marchande pour des raisons personnelles ou professionnelles. Ce concept met l’accent sur une indemnisation qui tient compte de l’attachement et de l’investissement uniques d’un propriétaire à l’égard de son bien. Le concept de valeur pour le propriétaire est pris en compte dans des juridictions telles que la Saskatchewan, l’Île-du-Prince-Édouard et le Québec.
Cependant, des provinces comme l’Île-du-Prince-Édouard sont en train de revoir leur législation sur les indemnités d’expropriation pour tenir compte de la valeur pour le propriétaire. Par exemple, le juge Matheson a fait remarquer dans l’affaire Haras Management et al. v. Gov. of P.E.I., 2017 PESC 14, que la province devrait envisager de réviser la loi sur l’expropriation afin de l’aligner sur les lois fédérales et provinciales d’autres juridictions concernant l’indemnisation appropriée en cas d’expropriation.
Résumé
Il est essentiel de comprendre la distinction entre la valeur marchande et la valeur pour le propriétaire dans les affaires d’expropriation. Alors que la valeur marchande constitue une référence objective largement utilisée au Canada, la valeur pour le propriétaire offre une approche plus personnalisée de l’indemnisation, en reconnaissant l’importance unique qu’un bien peut avoir pour son propriétaire.
EXPERIENCES ET ASPECTS A AMELIORER
Expérience à l’égard des lois sur l’expropriation
Tout au long de ma carrière, j’ai travaillé sur diverses lois d’expropriation à travers le Canada. Ces expériences ont mis en évidence les forces et les faiblesses du cadre législatif actuel. L’idéal est de laisser le propriétaire « entier ». Ce n’est pas toujours possible mais, comme l’a déclaré la Cour suprême du Canada dans l’affaire Irving Oil Ltd. c. R., [1946] R.C.S. 551, « le propriétaire déplacé doit être laissé autant que possible dans la même situation financière qu’avant la prise de possession, à condition que les dommages, pertes ou dépenses pour lesquels l’indemnité est demandée soient directement attribuables à la prise de possession des terres ».
Recommandations d’amélioration
En mettant en œuvre les recommandations suivantes, le droit et la pratique de l’expropriation peuvent être améliorés afin de garantir l’équité, la transparence et le soutien aux propriétaires concernés, ce qui permettra d’obtenir des résultats plus efficaces et plus équitables.
- Normalisation des pratiques de relocalisation :
- Élaborer des lignes directrices nationales : Collaborer avec les autorités fédérales et provinciales pour élaborer des lignes directrices normalisées sur les pratiques de réinstallation, en s’inspirant de l’URA des États-Unis.
- Formation et ressources : Fournir une formation aux professionnels de l’immobilier et au personnel de soutien pour s’assurer qu’ils comprennent les lignes directrices susmentionnées et qu’ils peuvent les mettre en œuvre efficacement.
- Services de soutien : Mettre en place des services de soutien complets, y compris des conseils, une aide financière et une logistique de relocalisation pour aider les personnes et les familles déplacées.
- Incorporation de la norme de la valeur marchande :
- Modifications législatives : Plaider en faveur d’amendements aux lois sur l’expropriation afin d’inclure explicitement la valeur marchande comme norme d’indemnisation.
- Normes d’évaluation : Élaborer et appliquer des méthodes d’évaluation normalisées afin de garantir des évaluations cohérentes et précises de la valeur marchande.
- Communication : Communiquer clairement la norme de la valeur marchande aux propriétaires et aux parties prenantes afin de garantir la transparence et la compréhension.
- Processus transparents et inclusifs :
- Engagement des parties prenantes : Créer des forums et des plates-formes pour un engagement régulier avec les propriétaires et les communautés concernées afin de recueillir leurs avis et de répondre à leurs préoccupations.
- Audience de nécessité : Réintroduire l’audience de nécessité dans la région du Grand Toronto pour certains projets de transport en commun qui ont été exclus, afin de fournir aux propriétaires concernés une plateforme formelle pour exprimer leurs préoccupations avant que les projets de transport en commun n’aillent de l’avant.
- Pratiques d’indemnisation : Normaliser les pratiques d’indemnisation à travers le Canada pour s’assurer que les propriétaires concernés sont toujours payés pour la valeur de la partie prise, favorisant ainsi la cohérence et l’équité.
Conclusion
Dans les relations avec les propriétaires et les locataires concernés, il est essentiel de tenir compte de la décision de la Cour suprême du Canada dans l’affaire Dell Holdings Ltd. c. Toronto Area Transit Operating Authority, [1997] 1 R.C.S. 32 :
« L’expropriation d’un bien est l’un des pouvoirs gouvernementaux qui n’est exercé qu’en dernier ressort. L’expropriation totale ou partielle d’un bien appartenant à une personne constitue une grave perte ainsi qu’une atteinte très importante aux droits privés de propriété des citoyens. Il s’ensuit que le pouvoir d’une autorité expropriante devrait être interprété de façon stricte en faveur des personnes dont les droits sont touchés. »
En adhérant à ce principe, nous pouvons nous assurer que le pouvoir d’expropriation est exercé avec le plus grand soin et la plus grande considération, dans le respect des droits et de la dignité des propriétaires concernés. Cette approche conduira à des processus d’acquisition de biens immobiliers plus équitables, plus compatissants et plus efficaces pour l’usage public.